dimanche 20 janvier 2008

Minority Report

Nous sommes, aux dernières nouvelles, encore en 2008, et vous passez, toujours, trop de temps sur Internet. En un mot, cela donne : bonjour !


Cela faisait déjà quelque temps que je n'avais pas actualisé ce blog. En fait, une fois passée l'hyperactivité des fêtes, il faut bien reconnaître que je n'ai pas grand chose de passionnant à raconter. Les rebondissements à suspense ne se sont pas multipliés au cours des deux dernières semaines. « Rapport minoritaire » de ma vie estudiantine, donc. J'ai repris les cours, et le Hall est à nouveau plein. Les étudiants, qu'ils soient indigènes ou internationaux, ayant passé un semestre à s'éclater en boîte tous les soirs commencent à prendre conscience des limites de leur mode de vie, pas tant du point de vue des études que de celui des finances.


Bon, je ne vais quand même pas arrêter là mon message de blog, ça serait faire injure à mon bavardage habituel. Je ne vais pas non plus me fendre de considérations ethnologico-socio-pseudo-scientifiques sur la faune locale. Donc je vais me permettre de relever une petite incohérence dans la gestion de la plomberie de la part de nos amis de l'administration du Hall. La preuve en image(s) :

Le robinet de l'évier dans ma salle de bains à Londres


Et voilà. Si c'est pas dramatique. Une seule vasque, deux robinets. Un d'eau bouillante, un d'eau glacée. Vous conviendrez qu'on a sans doute déjà vu plus commode. Dans une baignoire, cela n'est pas gênant, puisque le principe du bain consiste à rentrer dans une eau préalablement écoulée dans un espace clos ; or l'eau chaude et l'eau froide, une fois accumulées, somme toute, ça se mélange. Mais quand vous voulez simplement vous laver les mains, vous avez du mal à saisir toute la subtilité de l'installation. Là où ça devient ridicule, c'est quand on jette un coup d'oeil au robinet de la baignoire de la même salle de bains, à 2m30 à vol de mouche :

Le robinet de la baignoire de la même salle de bains...


Comme quoi, la directive Bolkestein aurait sans doute été bénéfique au Royaume-Uni : le plombier polonais aurait sûrement eu l'idée d'installer un robinet hybride aussi dans l'évier, lui. Sans transition, petite parenthèse ethnologico-socio-pseudo-scientifique sur l'insularité britannique. En effet, ce syndrome du « plombier polonais », celui de la figure sombre et incertaine de l'étranger qui vient voler le travail des honnêtes gens du coin, est omniprésent en Angleterre, peut-être même plus encore qu'en France. L'immigration polonaise est très mal vue par la majorité des Anglais que j'ai l'occasion de fréquenter, à savoir les jeunes ayant la chance de pouvoir étudier à Londres. La diversité culturelle a beau être extrême dans la ville de Franck Lampard, l'immigration polonaise n'en est pas moins considérée avec une méfiance qui n'est pas sans rappeler les plus belles envolées lyriques de Philippe de Villiers. Polonais sectaires, ne faisant aucun effort pour rien, n'apportant rien au pays et vivant sur le dos des locaux. « Oh, mais à mon avis c'est juste qu'ils seraient mieux chez eux, dans leur pays, nous on a rien contre eux ». On aura compris... Donc, voilà, les Polonais ne sont apparemment pas les bienvenus au Royaume-Uni. En ce qui concerne une autre minorité, à savoir les Pakistanais, comme il faut bien reconnaître qu'ils sont là depuis tellement longtemps qu'on a parfois même du mal à distinguer un Pakistanais d'un Anglais de souche au téléphone, et aussi parce qu'après tout ils font tous les sales boulots dont personne ne veut, on les tolère. Minorités, au rapport !


Je termine sur une petite anecdote, qui me semble assez représentative de la conception de la sécurité véhiculée dans Canterbury Hall. Avant-hier soir, en descendant au dîner, je me retrouve face à une affiche ayant été placardée sur tout ce qui ressemble de près ou de loin à une porte, et nous informant qu'un « intrus » avait été découvert dans le Hall.

"Attention All Residents - Earlier this week, the Senior Members and the
Security Officer apprehended an intruder inside Canterbury Hall"...

Je vous laisse méditer sur toute la subtilité de cette affiche, évoquant un « intruder » sans préciser s'il s'agissait d'un SDF cherchant refuge, d'un cambrioleur d'étudiants, d'un tueur psychopathe, ou, plus vraisemblablement, d'un pote de quelque résident ayant tenté de rentrer en catimini dans le Hall après l'heure limite autorisée pour les invités « officiels ». Je disais que cet intrus avait été « découvert dans le Hall » ? Quelle imprécision de vocabulaire ! C'est bien pire, il était "à l'intérieur" (inside), autant pour moi... Mais rassurons-nous, l'intrus fut intercepté par la milice locale, et mis dehors sans autre forme de procès. Fort heureusement, il existe une parade toute simple pour vous isoler des tourments tchétchènes qui secouent tous les jours le quartier de Russell Square. Morale de l'histoire : fermez votre porte à double tour, vous serez en sécurité. Amen. « Mieux vaut prévenir que guérir » : c'est aussi le leitmotiv du film hollywoodien Minority Report.


Vous pouvez maintenant reprendre une vie normale, pensez juste au gilet pare-balles si vous comptez me rendre visite à Londres. ^^ Allez, atchao bon dimanche !

mardi 1 janvier 2008

Overcrowded Thames Embankment

Nous sommes en 2008, et je ne me plaindrai pas que vos bonnes résolutions pour l'année qui commence n'incluent pas « passer moins de temps sur Internet », bonjour !

Ici Londres, toujours, où les Français parlent, toujours, aux Français. Pas d'autre changement majeur dans la capitale britannique que celui du calendrier, si ce n'est un détail démographique qui ne vous aura pas échappé, puisqu'il est l'objet du titre de ce message : on a retrouvé les Londoniens ! D'ailleurs, on se demande presque si on n'en a pas retrouvés plus qu'on en avait perdus, puisque la Ville de Londres attendait 350 000 personnes sur les bords de la Tamise hier soir pour le feu d'artifice du nouvel an. J'avais déjà eu la chance d'assister au feu d'artifice organisé par le maire Ken Livingstone (vous vous souvenez, le pseudo-homme de gauche anglais qui nous a fauché les JO de 2012 ?) la semaine de mon arrivée... pour le Thames Festival, qui avait été assez remarquable. Je m'attendais donc à quelque chose d'assez grandiose pour le spectacle « son et lumières » qui devait être tenu au pied du London Eye, la grande roue construite au bord de la Tamise pour le passage à l'an 2000.

Le London Eye, de jour (merci Myriam pour le copyright ;)

Et à l'évidence, je n'étais pas le seul à avoir ce genre d'attentes. Venant à pied, sous une pluie fine, tout droit depuis The Barbican, où séjourne ma famille, nous nous sommes dirigés plein sud pour rejoindre la Tamise, avec l'idée d'observer tout cela depuis, dans l'idéal, le Waterloo Bridge. Ayant été nommé responsable du trajet vers ledit pont, je me suis donc orienté avec mon instrument de navigation préféré : le pifomètre à aiguilles interchangeables, ce qui m'a conduit, bien involontairement, à nous faire passer sur notre chemin vers la Tamise par la rue de la bibliothèque de King's College, à laquelle, décidément, tous les chemins mènent. Je dois reconnaître que je ne me suis toujours pas remis de ce signe épatant de mon sérieux universitaire de première classe : la Maughan Library est mon étoile polaire à moi. Vous allez me dire, avec un prénom pareil...

Notre Maughan Library, toujours de jour (eh si...)

Bref, une fois arrivés à proximité de la Tamise, nous avons... pardon, je m'égare : j'ai la surprise de voir que la foule impressionnante de Fleet Street, se dirige vers l'Est, et donc vers Saint Paul et la City, en s'éloignant du London Eye et autre Waterloo Bridge. Me souvenant que le précédent feu d'artifice avait été tiré depuis le pied de la OXO Tower, qui se trouve à peu près au milieu entre Saint Paul et le London Eye, je me dis que l'Histoire va sans doute se répéter. En bons moutons de Panurge, nous suivons donc la foule sur Fleet Street, qui emprunte ensuite une rue adjacente menant directement sur les quai de la Tamise, pile en face de la tour en question. Croisant en chemin nombre de touristes, notamment un groupe d'Italiens chantant allègrement dans leur langue maternelle, nous progressons au milieu de la masse. Hallelujah, nous y sommes.

Au bout de la rue bondée : les quais de la Tamise, avec la OXO Tower en fond

Et en fait, non. J'ai renoncé à chercher une explication à ce mouvement de foule, mais le feu d'artifice a bien été tiré depuis le London Eye, et pas depuis la OXO Tower. On s'en remettra, pour une raison assez simple : la pluie fine sous laquelle nous avions entamé notre procession vers la Tamise ne s'est pas transformée en déluge, mais a eu le tort de s'installer, et de durer. Au nuage de fumée occasionné par les premières fusées du feu d'artifice se sont ajoutés les nuages naturels déjà présents et assez bas. Conséquence assez problématique d'un point de vue esthétique : nous n'avons pu voir que les premières fusées, l'avant-goût du feu d'artifice, puisque le reste était tiré trop haut, au dessus des nuages. On entendait très clairement la détonation, mais on ne voyait au mieux qu'une lueur de couleur au milieu de la brume plus compacte que jamais.

Le bouquet final, vu par nous...

Le bouquet final n'était d'ailleurs pas sans rappeler les plus belles images (nocturnes) des premiers bombardements américains sur Baghdad en 2003, qui avaient arrosé nos chaînes de télévision par besoin de sensationnel, alors que tout le monde convenait assez unanimement qu'on ne voyait absolument rien – à part quelques étincelles vertes sur fond noir. Tiens, j'y pense : voilà qui aurait fait un joli tableau à suspendre à la Tate Modern Gallery, dont on distinguait la monstrueuse cheminée d'usine depuis notre point de vue sur les quais de la Tamise. Le spectacle, même s'il n'était pas exactement à la hauteur de nos attentes, n'en a pas moins été assez festif et amusant, notamment grâce à la horde de touristes, français, espagnols, italiens, et autres, ayant investi le Thames Embankment le temps d'une soirée. Une fois le « feu d'artifice » terminé (enfin, une fois les détonations ayant cessé), une brume épaisse est descendue sur les quais, donnant l'impression d'un retour au début du 20ème siècle, où le fog londonien était encore légendaire.

La purée de pois à l'eau, séculaire spécialité anglaise

Mais voilà, les temps changent, et nous commençons à avancer sérieusement dans ce fichu 21ème siècle, et il ne me reste donc plus qu'une chose à dire : vous souhaiter à tous une très bonne année 2008, où que vous soyez, de San Francisco à Brisbane en passant par le reste des Etats-Unis, le Canada, l'Equateur, l'Argentine, le Brésil, l'Irlande, l'Ecosse, la Turquie, l'Inde, ou, plus sobrement (et majoritairement), la France. En espérant avoir de vos nouvelles : Happy New Year from London !